Vivre un profond silence intérieur

Comme l’indique Stéphane Drouet, il faut créer du silence dans notre corps et dans notre tête pour que notre conscience puisse observer et s’abandonner à l’instant présent et s’ouvrir à tous les possibles. Pour vivre où l’on devient totalement la Vie dans un état d’accueil, de présence, de détachement, de paix et d’émerveillement de ce que la Vie nous propose peu importe ce que nous voulons. Thierry Janssen, auteur de l’ouvrage Écouter le silence à l’intérieur, nous propose des moyens pour écouter ce silence à l’intérieur qui est essence de la présence et noyau de la conscience. Ces moyens concrets, simples et faciles à appliquer, donnent accès à l’essence de la Vie qui est en nous et autour de nous et par conséquent nous révèlent l’essentiel et nous permettent d’en prendre soin. Nous vous en présentons quelques uns pour vous donner l’envie d’explorer l’itinéraire spirituel qu’il propose pour s’éveiller à l’essentiel.

Constater.

Pour comprendre l’expérience de la conscience en train de contempler l’activité du mental, il est nécessaire de préciser la différence entre ces deux termes.

Le mental correspond à l’ensemble des capacités cérébrales qui permettent de penser. Il perçoit des informations dans le présent et les compare avec des informations du passé qu’il a mémorisées. Il pose des questions et il imagine des solutions. Il émet des jugements, il échafaude des croyances, il construit des raisonnements. Et, afin de pouvoir penser à propos de lui-même, il s’attribue une identité qu’il nomme “ moi ” – un moi qui dit “ je ” (ego en latin). Il est important de rappeler que le moi – l’ego – est un produit du mental. Il génère en nous le sentiment d’exister en tant que personne bien distincte et séparée de notre environnement. Et, étant tributaire de la capacité du mental à se projeter dans le futur, il fait naître en nous la peur de disparaître. Nous avons tous un mental différent. Ses spécificités dépendent de notre héritage génétique, de nos conditionnements sociaux et culturels et des apprentissages effectués au cours de notre existence. Notre mental est donc un attribut personnel et individuel. Pour préserver l’identité de notre moi, le mental passe son temps à se souvenir du passé et à imaginer le futur. Cela nous empêche souvent de rester connectés à l’instant présent. Et, pour éviter à notre moi de connaître la peur de disparaître, il cherche à prouver que notre PERSONNE existe à la fois dans le monde de la matière et dans celui des idées. Cela nous amène à poser des actes en permanence, “ faire ” nous paraît donc plus naturel que simplement “ être ”. Cela nous condamne aussi à penser tout le temps ; il se produit donc en nous un bavardage incessant.

La conscience, quant à elle ne pense pas. Elle constate, tout simplement. Certains considèrent que la conscience fait partie des compétences du mental. Il est important de préciser que cette “ conscience mentaleest plutôt une capacité d’attention (awereness), d’observation (observation) et de réflexion (reflection). La conscience dont il est ici question est la “ pure conscience ”, la pure constatation dépouillée de toute intention d’être attentif, d’observer ou de réfléchir. Cette conscience-là ne peut se connaître qu’au travers de l’expérience méditative. Car la méditation profonde, que Thierry Janssen appelle la “ contemplation ”, apaise le mental à un point tel que celui-ci peut être désactivé. Cela permet de découvrir que la pure conscience est au-delà de la pensée. Elle n’analyse pas, elle ne commente pas, elle ne juge pas. Elle accueille et elle accepte ce qui est sans condition. En ce sens, nous pouvons dire qu’elle est le véritable amour inconditionnel. Contrairement au mental qui est personnel et individuel, la pure conscience est absolument non personnelle et indiscutablement universelle. Elle est la même en chacun de nous. Elle est pure présence silencieuse, paisible et aimante. C’est pourquoi la contemplation paisible et silencieuse fait naître la joie, accompagnée d’un élan d’amour.

Questionnement et application.

Installez-vous confortablement.

Respirez calmement.

Maintenant, faites l’effort de vous rappeler une situation conflictuelle avec une personne de votre entourage ou un événement qui vous a contrarié. Voyez, c’est-à-dire constater si vous pouvez simplement accueillir ce souvenir dans le silence de la conscience. Pouvez-vous empêcher votre mental d’interpréter et de commenter ce qui s’est passé.

La prochaine fois que vous serez plongé dans une situation conflictuelle ou confronté à un évènement contrariant, respirez calmement et laissez la conscience éclairée ce qui se passe. Vous serez probablement étonné par ce qui va émerger en vous.

Contempler et connaître.

L’expérience mystique – qui concerne les mystères – se retrouve dans toutes les cultures de l’humanité, à tous les âges de l’histoire. Elle est caractérisée par une dissolution de l’ego, une disparition de la sensation d’être séparé et un sentiment d’unité et d’amour pour tout ce qui est. Ceux qui l’ont vécue ont l’impression d’un éveil ou d’une révélation, un contact direct avec le Tout, Dieu, la Vérité ou la Réalité ultime. Ils ont la profonde conviction d’avoir eu accès au mystère de la Vie. Beaucoup d’enfants peuvent être qualifiés de mystiques. Ils ont un rapport direct avec la Vie dont ils perçoivent intuitivement le mystère. L’expérience mystique est celle de la pure conscience qui “ contemple ” sans analyser ni juger. Le verbe “ contempler ” décrit parfaitement ce qui se passe lorsque nous regardons longuement quelqu’un ou quelque chose, oubliant notre petite personne pour ne faire qu’un avec ce que nous regardons. Contempler n’est pas penser. Ce n’est même pas observer. C’est simplement être présent et accueillant. Les enfants contemplent le monde, ils se laissent imprégner par lui, ils ne le pensent pas, ils l’écoutent, ils le perçoivent. Ils acceptent totalement la réalité sans avoir besoin de lui donner une explication. Si seulement les adultes pouvaient les accompagner dans la contemplation sans déformer cette expérience de pure conscience avec des représentations mentales qui ne correspondent pas forcément à la réalité constatée. Dans la méditation-contemplation, il ne s’agit pas de “ faire le vide ” mais “ d’être vide ”, c’est-à-dire d’accueillir tout ce qui se présente dans le champ de notre attention sans l’analyser ni le commenter. Cela demande de calmer et de taire le mental pour contempler le monde dans la simple joie d’être.

On peut également “ constater ” ce qui se passe à l’intérieur de soi, un instant après l’autre, d’une expérience à l’autre. On peut ainsi développer une “ connaissance intuitive ” à travers des expériences vécues dans le corps, au plus près des émotions et laisser éclore ce qui est déjà à l’intérieur de soi. Il existe en effet une connaissance intuitive ou transcendante très différente de la connaissance mentale que l’on acquiert par l’analyse et la réflexion intellectuelle. Les Indiens donnent le nom de prajna à cette forme de connaissance. Véritable connaissance transcendante, la prajna surgit en avant ou au-delà du mental, en avant ou au-delà du savoir intellectuel. Elle apparaît lorsque l’on est en contact direct avec les êtres et les choses, sans que le mental puisse interpréter et donc déformer ce qui est constaté. Cette connaissance transcendante naît du silence. Elle surgit de la pure conscience. Elle n’a pas d’avis sur son objet, elle le connaît pour ce qu’il est, tel qu’il est. Les Indiens disent que la prajna donne accès à la sagesse, car elle invite à accepter ce qui est et elle permet de trouver le moyen de vivre en paix quelle que soit la réalité à laquelle on est confronté. Le mental peut mentir alors que la conscience ne ment jamais. Il est intéressant de constater que le mot “ mental ” vient de mens, un mot latin dérivé du verbe mentiri : “ mentir ”. Le mot “ philosophie ” veut dire “ l’amour de la sagesse ”. Pourquoi la quête de celle-ci génère autant de conflits idéologiques, autant de guerres d’écoles ? La réponse à cette question réside peut-être dans le fait que les théories philosophiques sont issues du mental. Cela signifie qu’elles sont créées par le moi. Elles peuvent donc être utilisées pour conforter le sentiment égotique d’être différent et séparé. Bon nombre de philosophes, totalement identifiés à ce qu’ils pensent, veulent imposer leurs idées pour continuer d’avoir le sentiment d’exister. Cela crée beaucoup d’oppositions, de confrontations, de divisions et de séparations. Aimer la sagesse n’est pas la même chose qu’être sage. Le vrai sage ne pense pas la Vie, il la vit. Au-delà du mental, la conscience éveillée, le cœur ouvert, il ne tombe pas dans le piège des mots ni dans les travers de l’ego. Il accepte ce qui est et il essaie d’en faire quelque chose de constructif. La vraie sagesse ne prône jamais la division et la séparation. Elle est toujours au service de l’union et de la création.

Questionnement et application.

Installez-vous confortablement.

Respirez calmement.

Prenez le temps de répondre à ces questions :

Avez-vous tendance à conceptualiser l’existence ? Vivez-vous en fonction de principes appris dans les livres ou auprès d’autres personnes, ou bien préférez-vous faire confiance à ce que vous apprenez à travers vos propres expériences ?

Êtes-vous identifié à ce que vous pensez au point d’avoir des difficultés à changer d’avis ou bien êtes-vous capable de modifier votre opinion en fonction de ce que vous avez constaté par vous-mêmes en faisant fi de vos a priori ?

Vous arrive-t-il d’avoir accès à des évidences qui s’imposent à vous au-delà de toute logique ? Tenez-vous compte de ces évidences ou, au contraire, avez-vous tendance à les remettre en question en les soumettant à la réflexion intellectuelle ?

Choisir.

La névrose réfère aux stratégies mentales destinées à éviter ce que l’on craint mais qui finissent généralement par recréer ce que l’on cherche à éviter. La névrose est un processus mental lié au sentiment que nous avons d’exister en tant que personne séparée de son environnement et condamnée à mourir un jour. Toutes nos peurs sont issues de la grande peur de disparaître. Les stratégies destinées à éviter ce que nous redoutons deviennent rapidement des conditionnements profondément inscrits dans le mode de fonctionnement de notre mental. Ces conditionnements déclenchent des réactions automatiques qu’il est très difficile de désamorcer. Il faut de l’espace à l’intérieur de soi pour prendre du recul et comprendre que, dans la plupart des cas, nos peurs ne sont pas fondées. Nous pouvons alors faire le choix de ne plus simplement réagir mais, au contraire, d’agir en conscience afin de ne plus entretenir la logique névrotique qui recrée ce que nous redoutons. C’est la voie de la vraie liberté. Il est difficile pour le mental d’abandonner ses croyances et de revoir ses schémas de comportement. Car le moi – l’ego -, qui n’est qu’un produit du mental, est totalement identifié à sa façon de penser et de se comporter. Changer ses croyances et modifier sa manière de réagir reviendraient, pour lui, à perdre son identité. Il est donc prêt à tout pour continuer à fonctionner comme il a l’habitude de le faire. Quitte à ce que ses comportements inappropriés engendrent une véritable crise. Un conflit intérieur; un épuisement professionnel; une dépression ou encore une maladie corporelle. Toute crise est une invitation à faire un choix (krisis en grec : “ le choix, la décision ”). Nous pouvons alors continuer de penser et de nous comporter comme nous le faisions jusqu’alors au risque d’aggraver la crise à laquelle nous sommes confrontés. Ou bien nous pouvons faire l’effort d’identifier les causes de celle-ci et mettre en place d’autres façons de penser et de nous comporter pour sortir de l’impasse et inventer une nouvelle réalité. Encore faut-il pouvoir identifier les causes de la crise. Cela demande de faire taire notre mental rempli de certitudes et d’écouter la voix silencieuse de la conscience qui constate la situation telle qu’elle est. Alors seulement la sagesse profonde peut nous indiquer le chemin à suivre. Celui-ci passe toujours par une réduction de la tension, un apaisement du mental et une détente du corps. 

Questionnement et application.

Installez-vous confortablement.

Respirez calmement.

Maintenant, remémorez-vous une crise passée de votre existence ou pensez à une crise que vous vivez actuellement. Crise en rapport avec votre activité professionnelle, une relation d’amitié, votre famille, votre vie sentimentale. Répondez à ces questions avec honnêteté et humilité :

Avez-vous pu identifier clairement les causes qui ont mené à cette crise ?

Avez-vous pu identifier clairement votre part de responsabilité dans la mise en place de ces causes ?

Avez-vous pu échapper à la tendance qu’à notre mental à inventer une histoire pour ne pas devoir remettre en question les croyances et les comportements de notre moi ?

Avez-vous pu simplement constater dans le silence de la conscience quelle réponse apporter à cette crise ?

Si non, pouvez-vous le faire à présent ?

S’individuer.

Le moi est un produit de notre mental qui dit “ je ” – ego – en latin. Il s’agit d’une identification à ce que nous sentons, à ce que nous éprouvons et à ce que nous pensons. La psychanalyse et, à sa suite, les observations de la psychologie clinique ont montré que la finalité du fonctionnement du moi est l’adaptation et la survie. Notre moi développe toutes sortes de stratégies destinées à lui éviter d’avoir à revivre des peurs et des blessures du passé. Et, en vertu de la logique névrotique, ces stratégies recréent souvent ce qui est redouté. Chaque répétition de nos peurs et de nos blessures du passé est alors une invitation à dépasser cette mécanique infernale. Comme si le tout était de prendre conscience de l’absurdité de nos stratégies de défense – des stratégies basées sur la peur et la séparation – pour, enfin, faire le choix de la confiance et de l’union. Union avec les autres, bien sûr. Mais, avant tout union avec la partie la plus profonde de nous-mêmes, le noyau de l’être : la conscience qui contemple ce qui est sans s’y identifier.

Le noyau de l’être est souvent appelé le “ Soi ” en psychologie. Cette notion introduite par le psychanalyste Carl Gustav Jung, est inspirée des concepts indiens d’Âtman (âme ou essence qui est en chaque individu)et de brahman (âme ou essence universelle). Elle se démarque clairement de la notion d’ahamkâra (ego ou moi personnel). Cela n’empêche pas la confusion de s’installer. Notamment à cause de la traduction de l’anglais au français. En effet, en anglais, le moi se dit the self que l’on traduit parfois par le “ soi ”. C’est la raison pour laquelle il est important de mettre une majuscule au Soi – le vrai Soi que certains auteurs anglophones désignent d’ailleurs comme the true self (par opposition au moi qui est alors traduit par the false self), ou que d’autres appellent the higher self (par opposition au lower self). Ces précisions sont importantes, car une grande partie de la psychologie contemporaine ne s’intéresse qu’au moi – à l’ego – et donc au mental. Par conséquent, la plupart des thérapies tentent d’agir sur les croyances et les représentations mentales. Elles visent à aider le moi à trouver un équilibre et une façon harmonieuse de fonctionner. Il est intéressant de constater que cette démarche s’inscrit dans une perspective de développement personnel, c’est-à-dire de développement du moi ou de l’ego. Le risque est alors de renforcer les comportements individualistes et égoïstes. D’autant plus que nos sociétés occidentales se sont construites sur la base d’une réflexion intellectuelle qui postule la primauté du mental et érige la notion d’individu en valeur suprême. L’originalité du travail de Jung est d’inviter à intégrer le développement personnel dans une perspective de croissance spirituelle. L’éveil de l’esprit. De “ l’esprit ” et non “ le mental ”. Car il y a une autre source de confusion. En effet, en français, le mot “ mental ” est souvent appelé “ l’esprit ”. En anglais, cette confusion est beaucoup moins fréquente, car le “ mental ” se dit the mind et “ l’esprit ” the spirit. L’esprit – le véritable esprit – n’a rien à voir avec le mental, car l’esprit est la conscience – la pure conscience – que Jung appelait “ le Soi ”. Voilà pourquoi le travail de Jung ouvre sur la dimension spirituelle de l’expérience humaine : l’éveil de la conscience.

Jung a très bien décrit comment, dirigés par notre mental, nous passons tous la première partie de notre vie à construire notre moi. Ce faisant, nous risquons d’alimenter la logique névrotique qui engendre la répétition de nos blessures et de nos souffrances. Nous connaissons alors toujours plus de séparation en nous et autour de nous. Nous gonflons notre ego au point de n’être préoccupés que de notre petite personne. À la longue, cela devient pathétique. Heureusement, certaines déconvenues et quelques crises de vie nous obligent à nous poser des questions sur le bien-fondé de cette façon de mener notre existence. La conscience – le Soi   – s’éveille en nous. Nous découvrons alors d’autres aspirations, plus profondes, plus essentielles et généralement plus altruistes. Nous nous posons la question du sens de notre existence. Le sens : à la fois la signification et la direction de notre parcours de vie. Les enquêtes menées auprès de larges populations dans des contrées et des cultures très diverses montrent que ce qui donne le plus de sens à l’existence, c’est d’exprimer le meilleur de soi, en lien avec les autres, au service des autres, pour un projet qui dépasse l’intérêt personnel. Nous pouvons reformuler cela en disant que ce qui donne tout son sens à notre existence, c’est d’utiliser les aptitudes et les qualités développées par notre moi au service des intentions du Soi. Cela se produit au cours de ce que Jung a appelé le “ processus d’individuation ”.

“ L’individuation ” décrite par Jung n’a rien à voir avec “ l’individualisation ” tant recherchée dans nos sociétés. L’individuation suppose un apaisement du mental, un effacement de l’ego, une dissolution du sentiment d’être séparé et un éveil de la conscience qui incite à mettre les capacités personnelles du moi au service des valeurs universelles du Soi. L’individualisation repose, au contraire sur la peur de ne pas pouvoir exister en tant que personne, elle aboutit à une inflation de l’ego, à un accroissement du sentiment d’être séparé et à une primauté des croyances et des aveuglements du mental qui incite à mettre les capacités du moi au service de ses propres intérêts personnels. Jung situait l’amorce du dégonflement du moi au profit du Soi vers la cinquantaine. De nos jours, il semble que, de plus en plus de gens, vivent cette transformation plus jeunes. Comme si la conscience s’éveillait de plus en plus tôt chez de plus en plus de monde.

Questionnement et application.

Installez-vous confortablement.

Respirez calmement.

Prenez le temps de répondre à ces questions avec honnêteté et humilité :

Avez-vous connu une ou plusieurs crises de vie qui vous ont amené à vous poser des questions sur le sens de votre existence ?

Avez-vous commencé à observer les comportements névrotiques de votre moi ?

Avez-vous compris la différence entre le développement personnelle et la croissance spirituelle ?

Avez-vous commencé à mettre les capacités développées par votre moi au service de quelque chose de plus grand que lui-même ? Ou bien utilisez-vous encore ces capacités pour rassurer et gonfler votre ego ? S’avouer cela n’est pas facile mais c’est un bon moyen de permettre l’éveil de la conscience en nous. Cet éveil est la condition indispensable pour entamer le processus d’individuation.

Avez-vous le sentiment d’avoir entamé le processus d’individuation ? Si oui, de quelle manière s’opère-t-il dans votre vie ?

Honnêteté avec soi, authenticité avec les autres.

Toute crise de votre existence est une occasion d’écouter un peu plus profondément le silence à l’intérieur. Il peut arriver que vous entendiez dans ces circonstances une voix à l’intérieur de vous – votre voix – qui vous indique ce que vous devez faire ou ne pas faire. Il s’agit là de l’émergence d’une sagesse non raisonnée et totalement intuitive rendue possible grâce à une fulgurance inattendue de la conscience, concomitante à une désactivation du mental. Cette expérience suscite souvent le besoin de raconter ou d’écrire ce que vous avez éprouvé et pensé. D’où l’intérêt d’un journal intime où “ je ” regarde “ moi ”. Un espace où la conscience met en lumière les croyances et les conditionnements du mental. Un lieu où on peut se dire des vérités. Un journal intime est un merveilleux outil au service de l’éveil de la conscience. Il ne s’agit pas de raconter des faits mais plutôt de poser des questions à propos de nos motivations. Pourquoi ? Qui pense comme cela ? Qui dit cela en moi ? Qui agit de la sorte ? Est-ce ma personnalité apeurée ou bien la pure conscience paisible et silencieuse ? Être profondément honnêtes avec nous-mêmes. Laisser émerger des conclusions que nous n’avons pas forcément envie d’entendre. Honnêteté avec soi et authenticité avec les autres sont deux qualités indispensables pour celui qui veut échapper aux pièges de son ego et parcourir un chemin de liberté. Tenir un journal intime permet de relâcher les tensions et de trouver un apaisement. Plusieurs études ont montré que cela génère des pensées plus positives, stimule le système immunitaire et produit des effets bénéfiques pour la santé. Mais le plus important, c’est qu’il nous permet d’entrer en contact avec notre guide intérieur, le maître de sagesse qui est au fond de chacun de nous.

Pour mieux éclairer le lien entre nos motivations à agir et notre état physique et mental, il y a lieu de préciser la différence entre “ exister ” et “ être ”. Exister, c’est occuper une place, manifester des capacités, dire sa vérité et agir dans le monde. Ce verbe vient du latin ex (hors de) sistere (être placé) et signifie littéralement “ vivre au-dehors dans le monde ”. Nous avons le sentiment d’exister lorsque nous sommes vus et reconnus par ceux qui nous entourent. Pour cela nous montrons la partie superficielle de notre individu : le moi pensant et agissant auquel notre mental est identifié.

Être, c’est être simplement présent, paisible et silencieux ; sans la moindre ambition d’occuper une place, de dire ou d’agir, d’être vu ou reconnu. Ce verbe vient du latin essere qui est lié à essentia : l’essence. Nous sommes lorsque nous laissons se révéler la partie profonde de notre individu – l’essence de l’être –, la pure conscience paisible et silencieuse qui n’est identifiée à rien. 

Exister nécessite de penser et d’agir. Être demande d’écouter, de percevoir et de goûter. Exister est la préoccupation du mental qui veut assurer sa survie ; c’est une affaire de personnalité, un défi pour l’ego. Être est l’état de la conscience qui constate la vie, c’est le rayonnement évident de l’essence ; cela ne peut se produire que si l’ego est rassuré, apaisé, dégonflé. 

Notre identité ne devrait pas être réduite à nos actions. Nous sommes des personnes qui agissons certes, mais au-delà, nous sommes la conscience qui constate les intentions avec lesquelles nous menons nos actions. Et, plus souvent qu’autrement, des tensions et des fermetures se manifestent en nous lorsque nos intentions émanent de la logique névrotique de notre ego apeuré. Et par contraste, on sent généralement de la détente et de l’ouverture lorsque l’on constate les effets négatifs de cette logique névrotique, ce qui nous rend capable d’écouter la voix sage qui se fait entendre dans le silence de la conscience. On comprend alors que les tensions et les fermetures empêchent la Vie de se manifester, tandis que la détente et l’ouverture permettent son épanouissement. Cela devrait nous inciter à plus de fluidité, de confiance et de subtilité, car au-delà des apparences matérielles, il existe une réalité énergétique faite d’intentions et de relations invisibles à l’œil non éveillé. Et, que le secret de la guérison tant physique que psychologique réside sans aucun doute dans la compréhension de cette dimension subtile de la réalité.

Questionnement et application.

Installez-vous confortablement.

Respirez calmement.

Avez-vous connu des fulgurances de la conscience au cours desquelles vous avez subitement compris quelque chose d’important ?

Si oui, est-ce que cela a modifié votre façon de penser et de vous comporter ?

Maintenant, prenez votre journal intime et choisissez une situation particulière, agréable ou désagréable. Demandez-vous qui en vous a agi dans cette situation ? Quelle était votre motivation profonde ? Avez-vous agi par peur ? Avez-vous simplement réagi par automatisme ? Ou bien avez-vous eu suffisamment d’espace en vous pour prendre du recul et choisir votre action en conscience ?

Poursuivez la tenue de votre journal intime en collant sur la première page une photo de vous, enfant. C’est pour cet enfant que vous écrivez dans ce journal. Pour l’être spontanée et extrêmement vivant que vous avez été et qui ne demande qu’à se révéler davantage à présent. Le but poursuivi est de vous poser des questions à propos des intentions de vos actions. Il s’agit de tout voir sans rien juger. Simplement constater avec objectivité, honnêteté, compassion et de laisser la conscience s’éveiller.

Respirer, se détendre, rire.

Colère, joie et tristesse. Voilà des émotions qui ne sont pas toujours bien comprises.

La colère est toujours liée à un besoin. Personne n’éprouve de la colère par hasard. Cette émotion contient la charge d’énergie nécessaire pour satisfaire le besoin auquel elle est liée. Précisons que les émotions ne sont ni positives ni négatives. Elles sont des signaux qui nous renseignent sur les enjeux de nos expériences. Dès lors il est plus juste de parler d’émotions agréables ou désagréables. Ce qui est positif ou négatif, ce sont les actions qui découlent de nos émotions. C’est ainsi que la colère peut engendrer des actions très positives, empreintes de créativité. Elle peut aussi être exprimée de façon très négative sous la forme d’une agressivité envers autrui ou, au contraire, étant contenue, devenir une forme d’agression envers soi-même.

La tristesse survient lorsque la colère n’a pu être exprimée et que, de ce fait, le besoin sous-jacent n’a pas pu être satisfait. Du point de vue énergétique, c’est la même charge d’énergie vitale qui, n’ayant pas pu être utilisée dans une action (positive ou négative), se met à peser sur celui qui contient sa colère. Cela génère un sentiment d’impuissance qui peut se transformer en résignation et, finalement, en dépression. Car l’un des principaux facteurs de la dépression psychique et physique, c’est la résignation.

La colère et la tristesse sont des émotions de la personnalité ; des émotions de l’ego. C’est le moi qui a des besoins, qui souffre, qui est frustré, qui exprime de l’agressivité, qui contient de l’énergie, qui se résigne et qui déprime. Le Soi n’éprouve rien de tout cela puisqu’en tant que pure conscience silencieuse, paisible et aimante, il ne fait que constater ce qui est dans la joie d’aimer et d’être pleinement vivant.

La joie est l’émotion du Soi ; l’émotion de l’essence. Elle est le signal de la pleine vitalité qui se manifeste lorsque nous sommes reliés à l’essentiel. Cette émotion vient d’un tout autre endroit que la tristesse, le contentement ou la colère. On peut être triste et joyeux à la fois. Car la joie est liée à l’amour, à la capacité d’accueillir et d’accepter ce qui est. Même si ce qui est nous rend triste ou nous met en colère. La joie surgit du cœur de l’être, lorsque nous disons “ Oui ” à la Vie, sans hésitation, sans restriction.

Accueillir la tristesse permet d’en prendre soin mais le corps peut rester tendu, contracté, fermé, en défense. Ce qui est souvent une façon de ne pas trop sentir l’inconfort crée par la résistance de l’ego à accepter la situation telle qu’elle est. Mais de tension en tension, cela peut nous faire entrer dans un cercle vicieux qui nous empêche de bien respirer. D’où la nécessité de se détendre pour respirer à nouveau, calmement, amplement, profondément. Respirer pour retrouver un équilibre entre tension et relâchement. Respirer pour se détendre. Respirer pour laisser l’énergie circuler dans le corps. Respirer pour laisser la Vie se répandre dans le corps. Respirer pour laisser la Vie se répandre dans l’être. D’où l’importance de pratiquer la cohérence cardiaque, le yoga ou le qi gond, des pratiques qui facilitent la libération du souffle. Elles permettent à la détente de s’installer dans le corps et, conséquemment à la paix d’envahir le mental. C’est alors que le cœur peut s’ouvrir davantage et nous rendre plus réceptif au silence toujours présent en nous pour l’écouter. La Vie connaît le chemin qui passe toujours là où il n’y a pas de tension. Se détendre ouvre le cœur. Ouvrir le cœur permet de se détendre. Le cercle est vertueux. L’ouverture du cœur permet l’éveil de la conscience. Voilà sans doute pourquoi les bouddhistes parlent du bodhicitta (bodhi : éveil et citta : cœur-esprit, cœur-conscience), c’est-à-dire le cœur éveillé. Ouvrir le cœur libère l’énergie de l’acceptation sans condition, l’amour inconditionnel. L’énergie de toutes les guérisons, en particulier, celle de notre ego blessé.

Le relâchement des tensions, en particulier au niveau de la poitrine (au niveau du chakra du cœur), permet de ressentir et de comprendre qu’il est inutile de vouloir lutter contre l’ego. Plus on essaie de le combattre et de le neutraliser, plus il se renforce. C’est bien normal puisque l’ego naît précisément de la peur de disparaître. Accueillir, accepter, aimer l’ego tel qu’il est, pour ce qu’il est, est le meilleur, si ce n’est pas le seul, moyen de l’apaiser. Dès que le cœur s’ouvre, la conscience peut s’éveiller et constate ce qui se passe en soi. On peut se voir (voir son ego) en train de répéter de vieux schémas de comportement, tomber dans les mêmes pièges que par le passé et recourir à des justifications maintes fois invoquées pour ne pas changer de façon d’être et de faire. C’est le moment de rire de soi-même, avec tendresse, avec humour. Car lorsque l’on constate avec amour surgit toujours l’humour. Et l’humour n’est jamais méchant. Au contraire, l’humour est toujours bienveillant, toujours réparateur, toujours guérissant.

Questionnement et application.

Installez-vous confortablement.

Respirez calmement.

Prenez le temps de vous rappeler une situation où vous avez éprouvé de la colère.

Pouvez-vous identifier le besoin non rempli et la frustration liés à cette colère ?

Prenez le temps de vous rappeler une situation où vous avez éprouvé de la tristesse.

Pouvez-vous identifier la colère non exprimée et le besoin non rempli à l’origine de cette tristesse ?

Prenez le temps de vous rappeler un moment de grande joie.

Pouvez-vous identifier l’élan vital et l’accomplissement essentiel liés à cette joie ?

Prenez un moment pour vous détendre, par une séance de cohérence cardiaque ou de défigement neurosensoriel.

Maintenant, sentez le plaisir de percevoir l’énergie de la Vie qui se propage en vous.

Cultivez la bienveillance à votre égard.

Rappelez-vous une expérience difficile pour votre ego et constatez simplement vos agissements sans les juger.

Riez de vous-mêmes, de votre ego et de ses agissements.

Rappelez-vous une situation vécue dans laquelle vos émotions et vos réactions étaient pilotées par votre moi apeuré. Regardez à nouveau cette situation mais cette fois avec humour en riant de vous-mêmes, votre ego et de ses agissements conditionnés, répétitifs et névrotiques.

Plongez dans le silence à l’intérieur, devenez ce silence.

L’écoute du silence à l’intérieur est une pratique contemplative qui est une voie de révélation du Soi. Car il ne s’agit pas d’aller quelque part mais bien de laisser émerger ce qui est déjà là. Elle se compose des quatre étapes suivantes : se poser, se déposer et se reposer ; ouvrir son cœur ; écouter le silence à l’intérieur ; devenir ce silence. Au final, pour notre moi – notre ego – cela revient à plonger dans le silence de la pure conscience (dans le silence du Soi, dans le silence de l’essence) et de s’y dissoudre. L’expérience est mystique, révélatrice, transformatrice. Cette pratique contemplative est une précieuse voie d’éveil spirituel. Présence à soi, présence aux autres, présence au monde. Acceptation de la réalité telle qu’elle est. Intuitions et inspirations remplies de sagesse. Sensation de vitalité. Sentiments de paix et de joie. Perception de l’unité de tout ce qui est. Élan d’amour. Compassion pour soi-même et pour autrui. Envie de simplicité, d’honnêteté et d’authenticité. Besoin d’aller à l’essentiel. Gratitude. Plus la pratique est assidue, plus les états de grâce qu’elle enclenche sont fréquents et prolongés.

Au départ, Thierry Janssen recommande de plonger dans le silence lors de séances de méditation de quinze à vingt minutes. Celles-ci permettent de se familiariser avec les quatre étapes de la pratique. Par la suite, de remplacer ces séances de méditation par de courtes plongées (de quelques secondes à quelques minutes) effectuées régulièrement, plusieurs fois par jour, voire plusieurs fois par heure, jusqu’à finir par entendre le silence la majeure partie du temps, même lorsqu’il y a beaucoup de bruit en nous ou autour de nous. Rappelons que le mental a tendance à s’identifier aux informations qu’il perçoit ainsi qu’aux sensations, aux émotions et aux pensées qu’il produit. Tout ce passe comme si, en focalisant sa capacité d’attention sur le silence intérieur, le mental finissait par s’identifier au silence qu’il perçoit. Pris au piège de son propre fonctionnement, il devient alors silencieux et la conscience peut réaliser pleinement sa capacité de simple constatation et d’accueil sans condition.

1ière étape : se poser, se déposer, se reposer.

Se poser.

Que ce soit lors d’une méditation plus longue ou lors d’une courte plongée dans le silence, il convient tout d’abord de se poser : prendre une pause dans le temps et une posture dans l’espace. Une pause dans le temps pour préciser l’intention de revenir à soi et d’écouter le silence à l’intérieur. Une posture dans l’espace pour atteindre cet état de la contemplation, un état à la fois vigilant et apaisé. Lors d’une méditation plus longue, il est recommandé de s’asseoir, les deux pieds sur le sol ou les jambes croisées en tailleur, les mains posées sur les cuisses, le dos bien droit sans prendre d’appui contre un dossier, le menton légèrement rentré de sorte que la colonne cervicale s’étire vers le haut, le regard dirigé vers le bas et les yeux mi-clos. Lors d’une plongée silencieuse de courte durée, il est recommandé d’avoir un bon ancrage ou enracinement. Cela demande de prendre conscience des pieds, des jambes et des genoux légèrement fléchis, de relâcher le périnée, de redresser et d’aligner la colonne vertébrale.

Se déposer.

C’est alors le moment de se déposer : focaliser l’attention sur les mouvements de la respiration, sans chercher à les influencer. Il s’agit de simplement constater l’inspire et l’expire. Inévitablement, des sensations, des émotions, des images et des pensées surgissent dans le champ de l’attention. Au lieu de s’y attacher, il suffit de revenir sans cesse à la constatation des mouvements de la respiration.

Se reposer.

Quelques minutes de focalisation de l’attention sur les mouvements respiratoires suffisent pour créer un apaisement du mental et une détente du corps. On peut alors commencer à se reposer.

2ième étape : ouvrir son cœur.

C’est le moment de focaliser l’attention sur la poitrine et de continuer à constater les mouvements de la respiration, en veillant à profiter de chaque inspire pour accroître l’ampleur du volume thoracique. Cela permet de sentir un espace s’ouvrir à l’intérieur de soi et, progressivement, une détente se répandre dans tout le corps. Cette détente est accompagnée d’un sentiment d’acceptation. Il est alors plus facile d’accueillir les sensations, les émotions, les images et les pensées qui surgissent dans le champ d’attention, sans les analyser, sans les interpréter et sans les juger. Une énergie d’acceptation sans condition se répand alors dans tout l’être. Un élan d’amour inconditionnel apparaît. Il est important de ne pas se contenter d’ouvrir le cœur en générant des pensées d’amour mais de réellement libérer les tensions de la poitrine pour permettre la circulation et la propagation de l’énergie d’amour en soi et autour de soi. Ouvrir le cœur “ physiquement ” et “ énergétiquement ” est nettement plus puissant que n’importe quel bon sentiment. Le cœur peut toujours s’ouvrir plus grand, c’est pourquoi il ne faut pas hésiter à littéralement faire éclater la poitrine en la dilatant très fort. Cela peut générer des douleurs au début, car, on ne s’en rend pas compte ; la cage thoracique est très contractée, très fermée, comme écrasée sous le poids de nos peurs et de nos défenses. Dès que le cœur s’ouvre vraiment, l’apaisement du mental et la détente du corps augmentent de façon significative. De la chaleur et des vibrations se répandent dans la poitrine. Des sentiments bienveillants et altruistes surgissent. Une profonde compassion pour soi et pour les autres envahit tout l’être.

3ième étape : écouter le silence à l’intérieur.

C’est le moment de profiter de l’apaisement du mental pour focaliser l’attention sur le silence qui est au-delà des sensations, des émotions et des pensées. Le silence qui est toujours là, à l’arrière-fond. Lorsque notre mental est agité, nous ne percevons qu’un bruit diffus et continu. Dès que le mental s’apaise, nous commençons à identifier chaque sensation, chaque émotion et chaque pensée. Lorsque le mental est très apaisé, nous pouvons explorer l’espace qui entoure et qui contient les sensations, les émotions et les pensées. Nous découvrons alors que cet espace est le silence dans lequel tout naît et tout disparaît.

4ième étape : devenir le silence.

Revenir sans cesse à la constatation des mouvements de la respiration, ouvrir le cœur toujours plus grand et focaliser l’attention sur le silence créent parfois un tel apaisement du mental que, d’un coup, toute pensée s’arrête. Dans un éclair, le silence prend alors toute la place au point que l’on devient silence. Cela peut faire peur. En réaction, le mental se réactive aussitôt. C’est le moment d’ouvrir le cœur encore plus grand. Car, si l’on ose se laisser glisser et dissoudre dans le silence, l’extase peut se manifester. Impression de dissolution dans un océan de paix et de lumière. Joie intense. Larmes à la fois pour les souffrances traversées et pour le bonheur révélé. Infinie gratitude. Paix. Sérénité. Sensation d’unité à l’intérieur et à l’extérieur. Plénitude. Sentiment d’union à tout ce qui est. Acceptation. Éveil. Cette expérience est bien au-delà des mots. Elle ne dure généralement pas très longtemps, car le mental reprend très vite ses droits en commentant et en analysant la situation. Mais peu importe. Le fait de l’avoir vécue, même brièvement donne accès à une certitude : les sensations, les émotions et les pensées qui surgissent ne sont que des phénomènes passagers qui apparaissent à la périphérie de l’être ; au centre, il y a un noyau paisible et silencieux, capable d’acceptation sans condition et donc rempli d’amour inconditionnel ; ce noyau est pure conscience et, de façon étonnante, bien qu’il soit au cœur de nous, il englobe tout. En utilisant la métaphore du cyclone, l’œil du cyclone représente la pure conscience qui est silence et amour inconditionnel. La tempête représente le mental en ébullition. Les nuages, les éclairs, le tonnerre, le vent et la pluie représentent les phénomènes passagers que sont les sensations, les émotions et les pensées. À l’intérieur de l’œil du cyclone, nous pouvons observer tous ces phénomènes qui se manifestent autour sans être touchés par la tempête. C’est exactement ce qui se passe pour la pure conscience qui constate la confusion des sensations, les perturbations des émotions et l’agitation des pensées, sans être troublée dans sa quiétude. En progressant dans l’exploration de l’œil du cyclone, nous pourrions pénétrer plus en profondeur dans cet espace libre de toute agitation, jusqu’à sortir de la tempête et nous retrouver en dehors du cyclone dans un ciel tout bleu et sans limites. C’est ce qui se passe lorsque l’on focalise sur le silence de la pure conscience : à force de plonger plus profond dans la quiétude, tout à coup on se retrouve projeté dans une dimension totalement paisible et silencieuse qui englobe tout ce qui est, pas seulement les sensations, les émotions et les pensées, mais tout, vraiment tout. La sensation est vertigineuse.

Un enregistrement vidéo (didactique) et un enregistrement audio (plus pratique) de la plongée dans le silence intérieur sont disponibles sur le site web, www.edlpt.com. Il suffit de sélectionner l’onglet “ Méditations ” dans la barre du menu principal, puis de choisir “ Plongée dans le silence intérieur ” (vidéo ou audio).

Application.

Installez-vous confortablement.

Respirez calmement.

Posez-vous, déposez-vous, reposez-vous.

Écoutez le silence à l’intérieur.

Contemplez une image d’un cyclone posée devant vous.

Ouvrez votre cœur, encore et encore.

Plongez dans le calme et le silence de l’œil du cyclone.

Devenez l’espace qui contient l’ensemble du cyclone.

S’éveiller à l’essentiel.

La plongée dans le silence intérieur n’est pas la énième méthode de développement personnel destinée à générer du bien-être. Les plongées dans le silence intérieur sont une véritable ascèse (exercice, entraînement). Bien sûr, elles déclenchent un profond changement d’ordre personnel mais, surtout, elles permettent un approfondissement d’ordre spirituel. Il est important de faire la différence entre les deux, car le développement personnel peut très vite se transformer en un renforcement égotique, tandis que l’approfondissement spirituel conduit toujours à s’oublier en tant que moi pour se mettre au service du Soi. Il convient donc de pratiquer régulièrement ces brèves plongées silencieuses, plusieurs fois par jour et de laisser le temps faire son œuvre. Vouloir provoquer l’éveil spirituel est le meilleur moyen de ne jamais le connaître. La conscience est vraiment éveillée en nous lorsque l’on accepte ce qui est. Dès lors, accepter le fait que l’éveil spirituel ne s’est pas encore produit en nous est le meilleur moyen de peut-être connaître un jour cette grâce. Peu importe que les plongées dans le silence intérieur donnent ou pas un état extatique. Si nous les pratiquons de façon régulière, elles nous apportent bien d’autres cadeaux qui, en définitive, participent à l’éveil spirituel sans que nous devions forcément passer par une expérience mystique.

Présence à soi, présence au Soi, présence du Soi.

Se poser, se déposer et se reposer de façon régulière au cours de la journée permet de revenir à soi. Être en contact avec ses sensations, ses émotions et ses pensées. Éprouver l’agitation ou l’apaisement du mental. Sentir les tensions ou la détente du corps. C’est être présent à soi, c’est-à-dire présent au moi qui est identifié à tout cela.

Ouvrir son cœur et écouter le silence à l’intérieur est alors un bon moyen de découvrir l’au-delà de soi (l’au-delà du moi) qui est en soi. Être en contact avec cette part essentielle, noyau de pure conscience, essence de l’être. C’est être présent au Soi qui est silencieux, paix et acceptation sans condition.

Devenir le silence lève tous les obstacles à la réalisation de cette part silencieuse, paisible et aimante. Être, tout simplement. Oui, être et connaître la joie de se sentir pleinement vivant. C’est ainsi que le Soi devient présent. C’est ainsi que l’essence devient présence.

Présence à l’autre.

Devenir le silence permet la présence du Soi. La pleine expression de l’essence de l’être. On découvre alors que cette essence est la même en chacun. Au-delà des différences de caractères, d’histoires personnelles, d’appartenances ethniques, sociales, religieuses ou culturelles, nous sommes tous habités par la pure conscience paisible, silencieuse et aimante. Rencontrer quelqu’un revient à rencontrer cette personne au-delà de son ego, au niveau du Soi. C’est assez déstabilisant car, la plupart du temps, nous nous scrutons, nous nous comparons, nous nous jugeons, nous nous séduisons, nous nous manipulons, nous nous opposons. Quelque soit notre mode relationnel, nous avons tendance à vivre une forme de dualité qui aboutit à de la séparation. Or rien de tout cela n’est possible face à quelqu’un qui laisse être l’essence en lui. La rencontre se fait à l’essentiel. On a alors l’impression d’être face à un vide à la fois silencieux et chaleureux. L’autre n’est pas absent. Au contraire, il est très présent. Sa présence est comme un espace d’accueil, un espace bienveillant dans lequel on se sent pleinement accepté, inconditionnellement aimé.

Rencontrer autrui au niveau de l’essence peut-être extrêmement confrontant. C’est comme se voir dans un miroir. Face à l’absence de pensées (et donc de jugements) dans le regard de l’autre, on entend les propres jugements que l’on a sur soi-même.

Rencontrer quelqu’un qui laisse être l’essence en lui nous fait entendre le silence en sa présence. Cela nous met en contact avec l’essence qui est en nous. Les barrières entre nous et l’autre s’effacent. Une vraie proximité s’installe. Une complicité. Une simplicité. Une fraternité. Une unité. L’impression d’être les mêmes. Un sentiment de compassion naît et grandit en nous. Le désir d’une entraide, d’une coopération. Un élan d’altruiste. Et, soudain, la joie surgit. Très souvent, ces “ rencontres essentielles ” finissent dans un éclat de rire irrépressible. Les yogis disent que c’est la shakti – l’énergie vitale – qui se manifeste. Si seulement nous prenions la peine de plonger quelques secondes dans le silence lorsque nous sentons que nous pourrions entrer en conflit avec autrui… Nous ne pourrions plus faire la guerre. L’amour pourrait se révéler à travers nous.

Présence au monde.

Contempler le monde avec un regard silencieux nous donne envie de l’aimer. Nous nous sentons reliés par l’essence à tout ce qui est. Ce sentiment d’union et de communion est très puissant et peut vous faire éprouver un immense respect pour chaque être et pour chaque chose, surtout lorsque vous êtes particulièrement présent au monde. Et alors votre rapport aux gens, aux animaux, aux végétaux, à la nature en général et même aux objets inanimés peut changer complètement. Vous vous sentez reliés à eux et vous avez alors envie de prendre soin de tous et de tout. Si seulement nous apprenions à nos enfants à plonger régulièrement dans le silence intérieur. Devenus adultes, ils ne feraient plus la guerre au monde mais ils en prendraient soin. Leur priorité serait alors de tout faire pour respecter le silence, la paix et l’amour qui forment l’essence de la Vie. Ils veilleraient à ne pas abîmer l’essence du monde.

La loi du moindre mal.

Respecter le silence, la paix et l’amour peut paraître utopique. Car, la vie – la “ vraie vie ” comme disent certains n’est pas facile.  Les intérêts des uns et des autres sont souvent divergents. Ce qui permet de préserver le silence, la paix et l’amour pour certains peut, au contraire, créer du trouble, du chaos ou du conflit pour d’autres. Comment faire alors pour respecter l’essence de la Vie en nous et autour de nous ? Comment faire pour ne pas abîmer l’essence du monde ? La réponse à ces questions se trouve dans le silence de la pure conscience. Tout voir et ne rien commenter. Simplement constater. Nous voyons alors un grand nombre des enjeux d’une situation. Plus la conscience est éveillée en nous, moins nous pouvons tricher. Nous sommes obligés de constater ce qui est positif ou négatif. Et même si notre moi tente de biaiser afin de pouvoir agir selon ses intérêts égoïstes et névrotiques, une voix, la voix de la pure conscience, nous dit ce qui est le plus respectueux de l’intérêt du plus grand nombre. Par conséquent, les choix que nous sommes amenés à faire ne servent pas forcément notre petite personne. Une intention altruiste s’exprime à travers nos actions. Et nous sommes souvent enclins à choisir la loi du moindre mal. Cette loi est prédominante dans la nature. Par exemple, bon nombre d’animaux n’hésitent pas à aider un congénère épuisé ou blessé. Cependant, lorsque cette attitude solidaire met la survie de la horde ou du troupeau en danger, ils finissent par abandonner l’animal en difficulté. Cela paraît cruel mais, en réalité, cela est sage. Car, du point de vue de la Vie, l’intérêt collectif doit primer sur les aspirations individuelles. C’est une priorité très difficile à accepter pour nos ego désireux de sauver leur propre peau en premier. En particulier, dans des sociétés comme les nôtres où l’individualisme est érigé en idéal.

La simplicité.

Écouter le silence à l’intérieur nous connecte à l’essentiel. Plus nous le faisons, plus nous éprouvons le besoin de nous dépouiller du superflu en nous et en dehors de nous. Aller vers toujours plus de simplicité, c’est le sens même du chemin spirituel. Se dépouiller du superflu en soi consiste à laisser tomber les masques que l’on porte pour montrer qui on est vraiment, avec l’humilité de constater ce qui est sombre et ce qui est lumineux, sans jouer de rôle, sans inventer un personnage, sans se cacher, dans la simplicité de l’authenticité. Se laisser être tel que l’on est. Cela permet de vivre dans le silence, dans la paix et dans l’amour inconditionnel. Se dépouiller du superflu en dehors de soi consiste à calmer les peurs de l’ego, abandonner les comportements névrotiques qui engendrent toujours plus de sophistication et de complications pour, enfin, revenir à l’essentiel. Lorsque les besoins de base (sécurité, nourriture, chaleur, temps, espace, liens sociaux, reconnaissance, appartenance) sont satisfaits, il n’est pas nécessaire (ni souhaitable) de chercher à obtenir plus et mieux. En tout cas, jamais aux dépends de l’équilibre indispensable à la préservation du silence, de la paix et de l’amour. C’est tout l’idéal consumériste de nos sociétés dites “ de progrès ” qui est alors remis en question. Lorsque la pure conscience est éveillée en nous, le silence nous dit qu’il est absurde de produire et de consommer autant. Absurde de ne pas respecter les besoins de silence, de paix et d’amour qui sont communs à tous les êtres vivants. Absurde de ne pas respecter le subtil équilibre qui a travers la loi du moindre mal, permet de préserver ces besoins essentiels pour le plus grand nombre.

La liberté de choix.

L’espace silencieux de la pure conscience permet de prendre le recul nécessaire pour ne pas réagir de façon automatique et conditionnée et, plutôt, agir avec la liberté de choisir. Car, il y a toujours un choix possible. Certains pensent, que le fait d’ouvrir le cœur et d’accepter ce qui est de manière inconditionnelle, implique de se résigner et de subir. C’est tout le contraire. Accepter n’est pas se résigner. C’est faire face à la réalité telle qu’elle est et décidé d’exercer une influence sur celle-ci afin de la faire évoluer.

Écouter le silence à l’intérieur permet de percevoir les tensions personnelles qui indiquent que l’on s’éloigne de l’essentiel nécessaire à la pleine expression de l’essence en soi. Plus on perçoit ces tensions, plus on a le choix d’ouvrir son cœur et de se détendre pour revenir au silence, à la paix et à l’acceptation sans condition. Écouter le silence à l’intérieur permet de percevoir les tensions qui, en résonnance avec ce qui se passe chez autrui, indiquent que la relation que l’on entretient avec lui n’est plus respectueuse de l’essentiel à la communion au niveau de l’essence. Plus on perçoit ces tensions partagées, plus on a le choix d’ouvrir son cœur et de laisser le silence, la paix et l’amour tisser le lien entre soi et l’autre.

Écouter le silence à l’intérieur permet de percevoir les tensions qui se manifestent dans le monde. Plus on perçoit ces tensions avec objectivité, plus on comprend que celles-ci résultent de déséquilibre délétères, plus on a le choix d’ouvrir son cœur pour ajuster les comportements névrotiques à l’origine de ces déséquilibres.

Écouter le silence à l’intérieur permet de nous rendre compte que nous ne sommes pas une personne apeurée qui a le cœur fermé. Nous sommes celui ou celle qui contemple cette personne sur la défensive. Voilà notre nature profonde, essentielle et éternelle. Tout à coup notre identité est remise en question. Nous découvrons que nous sommes beaucoup plus vastes que nous le pensions, car nous sommes la pure conscience créatrice qui est en tout et qui contient tout. Nous sommes. Libérés.

Questionnement et application.

Au fil des semaines et des mois, notez dans votre journal intime les changements que vous observez au cours de votre pratique des plongées dans le silence intérieur.

Comment évolue votre rapport à vous-mêmes ? Avez-vous plus de bienveillance et de compassion à votre égard ? Parvenez-vous à rester en lien avec le noyau paisible et silencieux de l’essence malgré les tourments éprouvés par votre ego ? La joie se manifeste-t-elle plus souvent dans votre existence ?

Comment évolue votre rapport aux autres ? Avez-vous pu faire l’expérience de les rencontrer dans le silence de l’essence ? Avez-vous essayé d’ouvrir votre cœur et de rester à l’écoute d’autrui, présent à vous-même et présent à l’autre ?

Comment évolue votre rapport au monde ? Avez-vous tendance à simplifier votre vie ? Éprouvez-vous l’élan de prendre soin de votre environnement ? Le silence, la paix et l’amour sont-ils en train de devenir les priorités qui motivent vos actions ?

En conclusion.

Comme le dit Thierry Janssen : Le cœur n’est jamais assez ouvert, nous pouvons toujours l’ouvrir plus grand afin de laisser passer la conscience s’éveiller en nous et l’amour être à travers nous ”. En pratiquant cela, peut-être aurez-vous la grâce d’entendre la voix de sagesse dans le silence de la pure conscience, d’éprouver une grande paix, de ressentir une joie intense et une immense gratitude d’être en vie, d’être la Vie.


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